La charge d'une batterie acide-plomb

Principe électrochimique de la charge d'une batterie acide-plomb

La charge d’une batterie consiste à réaliser la réaction chimique inverse de la charge. Cette réaction inverse n’étant pas naturellement possible, il convient de réaliser ce qu’on appelle une réaction forcée. Pour cela, on utilise un générateur qui va forcer le passage des électrons dans le sens inverse : on appelle ce procédé électrolyse.

Réaction d'électrolyse


La réaction d’électrolyse se décompose en deux réactions :

=> Une réaction de réduction; l'oxydant le plus faible se réduit selon l'équation suivante : Ox1 + électrons → Red1

=> Une réaction d'oxydation; le réducteur le plus faible s'oxyde selon l'équation suivante : Red2 → Ox2 + électrons

La réaction d’électrolyse est alors le bilan de ces deux équations : Ox1 + Red2 → Ox2 + Red1

Principe de l'électrolyse lors de la charge d'une batterie
Principe de l'électrolyse lors de la charge d'une batterie


Cette réaction n’est pas naturelle et il convient de la forcer par la présence d’un générateur électrique.
Principe de l'électrolyse lors de la charge d'une batterie

Dans une batterie acide-plomb, les couples oxydants-réducteurs mis en jeu pour la charge sont les même que pour la décharge, c’est-à-dire les couples PbO2/Pb2+ et Pb2+/Pb, dont les potentiels sont indiqués ci-contre (par rapport à la référence H+/H2).

Ainsi, l’oxydant le plus faible est l’ion plomb (Pb2+). Celui-ci va se réduire en plomb (Pb) selon la demi-équation de réduction suivante : Pb2+ + 2 e- → Pb (1') [Réaction de réduction forcée]

De même, le réducteur le plus faible est l’ion plomb (Pb2+). Celui-ci va s’oxyder en oxyde de plomb (PbO2) selon la demi-équation d’oxydation suivante : Pb2+ + 6 H2O → PbO2 + 4 H3O++ + 2 e- (2') [Réaction d’oxydation forcée]

On obtient la réaction d’oxydoréduction forcée suivante : 2 Pb2+ + 6 H2O → Pb + PbO2 + 4 H3O++ [Réaction d’oxydo-réduction forcée]



Le processus est illustré ci-dessous :

Réaction d’oxydation forcée à l’anode (2') Réaction de réduction forcée à la cathode (1')
Réaction d’oxydation forcée à l’anode (2') - Réaction de réduction forcée à la cathode (1')


Les électrodes retrouvent donc leur masse initiale, ainsi qu’illustré ci-dessous :

Les électrodes retrouvent leur masse initiale
Les électrodes retrouvent leur masse initiale


Stratification de l'électrolyte & Surcharge

L'électrolyte, constitué d'acide sulfurique diluée dans l'eau, est un paramètre déterminant vis-à-vis de la durée de vie des électrodes (en par suite de la batterie).

Electrolyte optimale


Rappelons que le rôle de l'acide sulfurique principale est de fournir des ions H3O++ entrant dans les réactions chimiques relatives à la décharge. Il convient également que l'électrolyte présente une bonne conductivité ionique. Ceci permet d'améliorer l'efficacité de la charge en diminuant la résistance interne de la batterie.

Or, nous savons que la densité de l’électrolyte joue un rôle important sur la conductivité ionique. Le graphe ci-dessous indique la conductivité de l’électrolyte en fonction de la densité d’acide sulfurique :

Influence de la densité de l'électrolyte sur sa conductivité
Influence de la densité de l'électrolyte sur sa conductivité


On remarquera que, pour une densité de l'électrolyte comprise entre 1.12 et 1.38, la conductivité est maximale. Ces densités correspondent à une concentration massique d'acide sulfurique de l'ordre 30%.

Typiquement, lorsque la batterie est complètement chargée (état de charge de 100%), la densité de l'électrolyte doit être proche de 1.38. Puis, au cours de la décharge, la densité de l'électrolyte diminue jusqu'à une valeur minimale de 1.12 (pour un état de charge de 0%). On veillera donc, lorsque les batteries sont fournies sans électrolyte, à respecter ces valeurs lors du remplissage.


Au fur et à mesure des cycles, la distribution de l'électrolyte devient de moins en moins uniforme. Les ions étant plus lourd que l'eau, ils tendent à s'accumuler dans le fond du bas créant ainsi une stratification de la densité d'acide. Les conséquences sont une diminution de la conductivité dans les zones à faible densité d'acide, et une très forte accélération du phénomène de corrosion des grilles pour les zones à densité d'acide supérieur à 1.38. En conséquence, on assiste à une affaiblissement de la capacité de la batterie, et à un vieillissement précoce.

Un moyen pour lutter contre la stratification de l’électrolyte est l’application d’une légère surcharge.

Surcharge des batteries


La surcharge est un état de charge de la batterie pour lequel les éléments réactifs ne sont plus présent en quantité suffisante (l'état de charge est de 100%).

Lorsque la charge de la batterie est terminée, la concentration des ions Pb2+ au sein de l'électrolyte devient insuffisante. Ainsi, le générateur électrique ne contribue plus à charger la batterie (de toute façon, celle-ci est complètement chargée) mais à forcer la seule réaction susceptible de se produire, à savoir l’électrolyse de l’eau avec un dégagement gazeux de dihydrogène et de dioxygène important et dangereux.

Electrolyse de l'eau


L'électrolyse de l'eau est une réaction secondaire qui se produit lors de la charge d'une batterie. Lors du processus de charge, elle n'est pas prépondérante par rapport à la réaction primaire (voir le paragraphe sur le principe électrochimique de la charge), cependant elle le devient lorsque la batterie a atteint 100% de son état de charge.

En fin de charge, l'électrolyte est dépourvu des ions Pb2+. Par conséquent, sous la tension imposée par le générateur, la réaction qui se produit est l'électrolyse de l'eau :
  • Oxydation à l'anode : 3 H2O + ½ O2 → 2 H3O+ + 2 e-
  • Réduction à a cathode : 2 H3O+ + 2e- → H2 + 2 H2O
On obtient la réaction d'électrolyse de l'eau : H2O → ½ O2 + H2

La réaction d'électrolyse de l'eau se traduit donc par la production de dioxygène (O2) et de dihydrogène (H2) sous forme gazeuse.


La surcharge est une étape importante du processus de charge car elle permet de brasser l'électrolyte. En effet, le dégagement gazeux issu de l'électrolyse de l'eau permet de remuer l'électrolyte et de l'homogénéiser, assurant une destratification.

Lors du processus de charge gérée par le régulateur (Voir le chapitre sur les régulateurs), en fin de charge, la tension de charge aux bornes de la batterie est légèrement surélevée (de l'ordre de 2.3 V par éléments) afin d'accélérer l'électrolyse de l'eau et brasser l'électrolyte.



En dégageant du dihydrogène gazeux et du dioxygène gazeux, la réaction d’électrolyse de l’eau permet de brasser l’électrolyte et d’éviter le phénomène de stratification de l’acide sulfurique
En dégageant du dihydrogène gazeux et du dioxygène gazeux, la réaction d’électrolyse de l’eau permet de brasser l’électrolyte et d’éviter le phénomène de stratification de l’acide sulfurique. Ce phénomène est volontairement amplifié mais contrôler par le régulateur en fin de charge


Illustration du dégagement gazeux lors du processus de surcharge permettant une homogénéisation de l'acide sulfurique au sein de l'électrolyte
Illustration du dégagement gazeux lors du processus de surcharge permettant une homogénéisation de l'acide sulfurique au sein de l'électrolyte


L'évacuation des gaz (dioxygène et dihydrogène) s'effectue par des orifices situés en partie supérieure de l'élément de la batterie
L'évacuation des gaz (dioxygène et dihydrogène) s'effectue par des orifices situés en partie supérieure de l'élément de la batterie


Conséquences


Le brassage de l'électrolyte par dégagement gazeux permet l'homogénéisation de l'acide sulfurique mais présente néanmoins deux inconvénients majeurs :
  • Le dihydrogène est un gaz explosif au contact de l’oxygène. Dans le cas des batteries ouvertes, il convient que le coffret des batteries soit bien ventilé par la présence notamment d’ouvertures. Il est à noter que le dihydrogène est dangereux dans l’air lorsque sa teneur est supérieure à 3%.
  • La réaction d’électrolyse consomme l’eau de l’électrolyte ce qui a pour conséquence de diminuer le niveau de celle-ci mais également d’augmenter la concentration de l’acide sulfurique (risque accru de corrosion des électrodes). Il convient en ce sens de réaliser périodiquement des remises à niveaux du volume d'eau de l'électrolyte.


Vitesse de charge des batteries acide-plomb

La rapidité de la charge d'une batterie acide-plomb est limitée par la lenteur du phénomène de diffusion des réactifs au sein de l'électrolyte. Egalement, les réactions chimiques secondaires (comme l'électrolyse de l'eau) sont un obstacle à la rapidité de la charge.

Le processus de charge est géré par un régulateur. Les fabricants utilise couramment le procédé dit "IoUoU". Il s'agit d'un fonctionnement en 3 étapes :
  • I comme courant : pendant cette 1ère étape, on maintient un courant constant. Au fil de la charge, la tension de la batterie augmente. Si on maintient ce courant constant, la tension devient trop élevée (ce qui favorise les réactions chimiques secondaires), et il convient donc de maintenir une tension constante adaptée (étape suivante).
  • U comme tension : pendant cette 2ème phase, on maintient une tension constante, de l'ordre de 2.2 V (pour un élément de batterie de 2 V).
  • U comme tension : pendant cette 3ème phase, on maintient une tension constante légèrement supérieure à la précédente. C'est la surcharge, permettant le brassage de l'électrolyte.


Procédé de charge d'une batterie acide-plomb IoUoU couramment utilisé par les régulateurs de charge
Procédé de charge d'une batterie acide-plomb "IoUoU" couramment utilisé par les régulateurs de charge


Avec ce procédé, et sous réserve que la source d'énergie (en l'occurence, dans notre cas, l'énergie solaire photovoltaïque) soit suffisante, le temps de charge dure environ 10 h, pour passer d'un état de charge de 0% à 100%. En général, on interdit aux batteries un état de charge inférieur à 30% (voir paragraphe "Décharge profonde & Phénomène de sulfatation"). Par suite, le temps de charge est ramené à plus ou moins 9h.

Dans le cas des installations photovoltaïques autonomes, la durée de charge du procédé IoUoU est suffisante compte-tenu de la durée journalière d’ensoleillement et également du fait qu’une décharge totale est très rare.

Autres procédés de charge des batteries, plus rapide


Pour diminuer la durée de charge des batteries, il convient d’augmenter le courant de charge. Mais cela pose le problème du dégagement gazeux excessif dû à l’électrolyse de l’eau.

Une méthode de charge rapide consiste à augmenter la tension de charge au dessus de la tension de dégagement gazeux, de façon périodique et ponctuelle. Le dégagement gazeux se produit de façon périodique, mais celui-ci est contrôlé évitant des dommages à la batterie. Ce processus, appelé aussi déstratification précoce, permet de réduire la durée de charge à 4 heures.

D’autres procédés encore plus rapides permettent de réduire à 1 heures la durée de charge. Nous n’en parlerons pas dans cet ouvrage, mais il est à noter qu’un brevet EDF/Université Montpellier II a été déposé en 2008.



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