Production électrique d'une installation photovoltaïque autonome

L'évaluation du gisement solaire et la quantification des diverses pertes vont nous permettre à présent de calculer le productible d'une installation photovoltaïque autonome. Précisons que la production électrique ainsi produite est physiquement ajustée à la consommation des récepteurs électriques. Par exemple, l’absence de consommation (de la part de ces appareils) induit également une absence totale de production de la part du champ photovoltaïque, et ce malgré un niveau d’éclairement potentiellement important. Ainsi, dans cette partie, nous parlerons bien du potentiel de production électrique de l'installation.

Calcul du productible électrique

Formule analytique


Il existe une formule analytique simple permettant d’estimer la production électrique d’une installation photovoltaïque.

Formule analytique simple permettant d’estimer la production électrique d’une installation photovoltaïque


Exemple


Soit une installation photovoltaïque ayant les propriétés suivantes :
  • Puissance crête : 1.5 kWc.
  • Les modules en toiture, posés en toiture, sont orientés à 15° vers l'est, et présentent une inclinaison de 20°.
  • Localisation : Chambéry.
  • Les modules sont posés en surimposition. On considérera donc que cette configuration permet une ventilation relativement bonne. De plus, le régulateur est muni d'un dispositif MPPT : PR=0.70.
Le site de l'INES nous permet de déterminer l'énergie solaire journalière Ei, mois par mois, Chambéry :

Irradiation solaire journalière à Chambéry
Irradiation solaire journalière à Chambéry (d'après les données du site de l'INES http://ines.solaire.free.fr/gisesol_1.php)


Au mois de février (par exemple), l'irradiation solaire vaut Ei, Février = 2.29 kWh/m²/jour, l'application numérique donne le résultat suivant :

EFévrier = 1.5 × 2.29 × 0.70 = 2.40 kWh/jour.

L'installation pourra donc produire 2.40 kWh d'électricité par jour en moyenne durant le mois de février. Sur le même principe, le lecteur pourra s'exercer à calculer le productible de l'installation pendant les autres mois de l'année.

ATTENTION : La formule de calcul présentée ne prend pas en compte les pertes par ombrage de l’installation. Seul un logiciel permet de calculer la production en considérant les masques.

Calcul avec logiciel


Le calcul précédent est une estimation rapide et ne remplace pas la simulation dynamique avec logiciel. Il existe des logiciels de simulation permettant de calculer avec précision la production électrique d’une installation photovoltaïque, notamment en prenant en compte les ombrages proches et lointains. Nous pouvons citer par exemple :
  • PV-SYST, développé par l'université de Genève.
  • ARCHELIOS développé par le bureau d'études Cythelia en Savoie (73).
  • Etc.


Effets des ombrages sur une installation photovoltaïque

Pour fonctionner de manière optimale, une installation solaire photovoltaïque doit être soumise au moins d’ombrage possible. Cependant, certaines contraintes liées au lieu d'installation (présence de montagne, d'arbres, cheminée, poteau électrique…) ne peuvent être évitées.

On appelle masque tout obstacle cachant les modules photovoltaïques de la lumière du soleil. On distingue les masques proches et les masques lointains. Ces deux notions sont définies par la suite.

Masques


=> Masques lointains
Le masque lointain représente l’ensemble des obstacles dont l’angle avec lequel on l’observe ne varie pas lorsque l’observateur se déplace de quelques mètres. Cela peut être une colline, une montagne, un bâtiment lointain. Il s’agit de l’horizon lointain. Par exemple, sur la photo ci-dessous, les deux petites collines représentent un masque lointain : elles risquent de provoquer de l’ombre à l’installation photovoltaïque au lever et au coucher du soleil.

Exemple de masque lointains
Exemple de masque lointains


=> Masques proches
Le masque proche représente l’ensemble des obstacles dont l’angle avec lequel on l’observe varie lorsque l’observateur se déplace de quelques mètres.

=> Relevé de masques
Un relevé de masques permet de déterminer les heures de la journée et la période de l'année pendant lesquelles une zone du champ photovoltaïque est à l'ombre. Il convient de réaliser un relevé de masque pour les masques lointains et un autre pour les masques proches.

Apprendre à réaliser un relevé de masques

Diodes by-pass


Les modules photovoltaïques sont munis de diodes by-pass. Celles-ci se trouvent dans le boitier de connexion à l’arrière des modules :

Diodes by-pass
Diodes by-pass


Le rôle des diodes by-pass est double :
  • Protéger les cellules contre le phénomène de point chaud (hot spot)
  • Améliorer la performance des modules soumis à l’ombrage


Afin de bien comprendre le rôle et l’intérêt des diodes by-pass, nous allons considérer l’exemple d’un module d’une puissance de 180W, composé de 60 cellules en série.

=> Cas N°1 - Module en fonctionnement normal
En fonctionnement normal, c’est-à-dire sans effet d’ombrage, toutes les cellules photovoltaïques composant le module fournissent leur maximum de puissance. Dans ce cas, toutes les cellules fournissent 3 W chacune :

Module sans diode by-pass en fonctionnement normal
Module sans diode by-pass en fonctionnement normal


=> Cas N°2 - Module ombragé sans diode by-pass
Lorsqu’une des cellules est ombragée, cela correspond à une sous-irradiation de la cellule. Cela se traduit par une diminution du courant débité par la cellule ombragée, et par conséquent par une diminution de la puissance fournie (P=U×I).

Comme les cellules du module sont connectées en série, la cellule qui débite le moins de courant impose ce courant aux autres cellules. Par conséquent, la puissance fournie par les autres cellules (non-ombragées) diminue aussi.

En première approximation, on peut considérer que la puissance générée par les cellules non-ombragée est égale à la puissance de la cellule ombragée (cette approximation est d’autant plus vrai que le pourcentage de cellule ombragée est important).

Considérons que la cellule ombragée délivre 1 W. Du coup, toutes les autres cellules fournissent aussi 1 W.

Module sans diode by-pass en fonctionnement avec une cellule ombragée
Module sans diode by-pass en fonctionnement avec une cellule ombragée


La puissance du module se retrouve être de 60×1=60 W. Cela correspond à une perte de puissance très importante à cause d’une seule cellule ombragée.

Par ailleurs, il peut se produire une inversion de polarité aux bornes de la cellule ombragée (la tension change de signe). Concrètement, cela signifie que le produit U×I change de signe aussi : la cellule ne se comporte plus comme un générateur mais comme un récepteur. En d’autres termes, elle se comporte comme un dipôle qui dissipe de l’énergie électrique (au lieu d’en produire) sous forme de chaleur. Par suite, la cellule s’échauffent ce qui peut endommager irrémédiablement la cellule. Ce phénomène d’échauffement de la cellule s’appelle un point chaud (ou Hot-Spot en Anglais).

Nous voyons à travers cet exemple que l’ombre est un ennemi redoutable pour un module photovoltaïque : perte importante de puissance et échauffement des cellules.

=> Cas N°3 - Module ombragé avec diode by-pass
Pour éviter ces effets indésirables, les fabricants ont implantés des diodes dites by-pass dont le principe est de court-circuiter les cellules ombragées.

Les constructeurs de module implantent généralement entre 2 et 5 diodes by-pass par modules (dans le boitier de connexion du module). Chacune des diodes by-pass est associée à un sous-réseau de cellules du module. Lorsqu’une des cellules du sous-réseau est ombragée, la diode by-pass devient passante, c’est-à-dire que le courant circule dans la diode en isolant ainsi du circuit électrique le sous-réseau de cellule associé.

Considérons que notre module photovoltaïque dispose de 3 diodes by-pass (D1, D2 et D3), chacune étant associée à un sous-réseau de 20 cellules. Supposons que la cellule ombragée appartienne au sous-réseau n°1. La diode by-pass D1 va donc court-circuiter le sous-réseau n°1 en laissant passer le courant directement vers le sous-réseau n°2 :

Module avec diodes by-pass en fonctionnement avec une cellule ombragée
Module avec diodes by-pass en fonctionnement avec une cellule ombragée


L’effet immédiat est que les 20 cellules du sous-réseau n°1 ne fonctionnent plus : elles délivrent 0 W. Cependant, les 40 cellules restantes ne sont plus affectées par la cellule ombragée : elles fournissent leur pleine puissance, c’est-à-dire 3 W. Par conséquent, la puissance du module est de 40 × 3 = 120 W.

La présence des diodes by-pass a donc permis d’améliorer la performance du module. Idéalement, il faudrait une diode by-pass en parallèle sur chaque cellule. Pour des raisons technico-économiques, le nombre de diodes by-pass sur un module est généralement limité à 5.

Homogénéités des cellules


Cet exemple montre qu’une cellule ombragée affecte les cellules voisines connectées en série.

Ce phénomène se produit plus généralement lorsque les cellules en séries ne sont pas identiques. D’où l’importance pour les fabricants de modules de toujours appariées des cellules photovoltaïques équivalentes.

De même, connecter en série des modules qui n’auraient pas la même orientation et inclinaison présenterait les mêmes conséquences (perte de puissance).


Phénomène courant retour


Le phénomène de courant retour se produit lorsque deux modules différents (ou chaînes de modules différentes) sont connectés en parallèle. Deux effets notables peuvent se produire :
  • Perte de puissance.
  • Endommagement du module.
Afin de bien comprendre le phénomène de courant inverse, nous allons considérer l’exemple d’un module d’une puissance de 180 W délivrant une tension U=30 V et un courant I=6 A.

Cas N°1 - Modules en fonctionnement normal
En fonctionnement normal, c’est-à-dire lorsque les deux modules en parallèle sont équivalents, le courant traversant chacune des deux branches vaut : I1= I2=6 A. Evidemment, la tension aux bornes des deux modules connectés en parallèle est la même :

Deux modules en parallèle en fonctionnement normal
Deux modules en parallèle en fonctionnement normal


Cas N°2 - Modules ombragés
Lorsqu’ un des deux modules est ombragé, son courant et sa tension diminue. La diminution du courant ne pose à priori pas de problème vu que les deux modules sont connectés en parallèle : la puissance du module ombragée diminue mais n’affecte pas la puissance du module non-ombragé. Par contre, la diminution de la tension du module ombragé va affecter la tension du module non-ombragé. En effet, la tension U se cale sur la plus petite tension, c’est-à-dire celle du module ombragé. De ce fait, on assiste non-seulement à une perte de puissance du module ombragée (ce qui est normal) mais aussi à une diminution de la puissance du module non-ombragé (ce qui est préjudiciable).

Dans notre exemple, un des deux modules est ombragé : son courant chute à 1 A (au lieu de 6 A) et sa tension diminue à 25 V (au lieu de 30 V). Du coup, la puissance développée par ce module est 1×25 = 25 W (au lieu de 180 W). Le courant du module non-ombragé est très peu affecté mais sa tension est égale à la tension du module ombragée, c’est-à-dire 25 V. Du coup, la puissance développée par ce module est 6×25 = 150 W (au lieu de 180 W).

Deux modules en parallèle dont un est à l’ombre
Deux modules en parallèle dont un est à l’ombre


Au-delà de la perte de puissance, il peut se produire une inversion du courant dans le module ombragé : c’est ce qu’on appelle un courant retour. Ce courant retour peut endommager le module lorsqu’il devient trop important. Généralement, la valeur maximale tolérée du courant retour est de 2 fois le courant de court-circuit du module (2×Icc). Afin de protéger les modules contre les courants retours, il existe deux solutions :
  • Installer des diodes au niveau de chaque chaînes afin d’empêcher le courant de circuler en sens inverse

    Diodes de découplage
    Diodes de découplage


    Ces diodes sont appelées des diodes de découplage. Ce procédé coûte cher et induit des chutes de tension singulière au niveau des diodes. Dans les installations photovoltaïques autonomes, ces diodes permettaient également de bloquer les courants nocturne en provenance des batteries, mais de nos jours, ce sont les régulateurs qui assurent cette fonction de blocage.


  • Installer des fusibles calibrés à 2×Icc

    Fusibles
    Fusibles


    Ces fusibles n’empêchent pas les courants retours mais fondent dès qu’ils dépassent la valeur limite, empêchant ainsi la détérioration des modules. Cette solution est beaucoup moins onéreuse que les diodes. Elle est ainsi préférée par les concepteurs d’installations photovoltaïques. Attention : le dimensionnement des ces fusibles doit aussi prendre en compte les courants de décharge des batteries à travers le champ PV (même en présence d'une protection intégré au régulateur, car celle-ci peut être inopérante)



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